Le démembrement de la clause bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie offre la possibilité de transmettre votre patrimoine dans des conditions avantageuses. Souvent rédigée par défaut « mon conjoint à défaut mes enfants » il est important de mieux la rédiger. Cheval Blanc Patrimoine vous explique comment !
1. Qu’est-ce que le démembrement ?
L’assurance-vie est le placement favori des Français. Et pour cause, elle permet de se constituer une épargne et de la faire fructifier grâce à une fiscalité très attractive.
Elle est également une solution souple pour transmettre une partie de son patrimoine à ses proches grâce au démembrement de la clause bénéficiaire. Mais qu’entendons-nous au juste par démembrement ?
Lorsqu’une personne est propriétaire d’un bien, quel qu’il soit, elle a le droit d’en user (l’usus), d’en jouir (le fructus) et d’en disposer (l’abusus), comme bon lui semble. Le démembrement de propriété est, alors, le fait de partager ces différentes composantes entre plusieurs personnes :
- le nu-propriétaire qui peut disposer de son bien
- l’usufruitier qui a le droit d’utiliser le bien et d’en percevoir les fruits.
Lorsqu’il s’agit d’un capital, qui est un bien qui disparaît dès son premier usage (un bien consomptible) on parle de quasi-usufruit. Le quasi-usufruitier va pouvoir utiliser la somme reçue comme il le souhaite, même la dépenser.
La seule contrainte est que le nu-propriétaire dispose d’une créance de restitution. Cela signifie que le quasi-usufruitier devra restituer, à la fin de l’usufruit, le montant équivalant à ce qui lui a été versé.
2. Le démembrement de la clause bénéficiaire en assurance-vie
Pourquoi est-ce intéressant à démembrer la clause bénéficiaire de son contrat d’assurance-vie ?
Tout simplement parce que cela permet de réaliser une double transmission à plusieurs personnes. C’est une technique très efficace pour optimiser la transmission de son patrimoine.
Le cas qui se présente le plus souvent est celui d’une personne qui va désigner son conjoint en tant que bénéficiaire de l’usufruit, et les enfants bénéficiaires de la nue-propriété.
En cas de décès de la personne qui a souscrit le contrat d’assurance-vie, le conjoint usufruitier recevra l’intégralité du capital.
Les enfants, quant à eux, vont bénéficier d’une créance de restitution à faire valoir sur la succession de l’usufruitier. C’est au moment du décès de ce dernier que les nus-propriétaires retrouvent la pleine propriété du capital.

3. Quels sont les avantages d’une clause démembrée ?
Parmi les avantages du démembrement de la clause bénéficiaire il y a le volet fiscal, qui peut être intéressant selon que les primes sont versées avant ou après 70 ans.
3.1. Les primes versées avant les 70 ans du souscripteur
Dans cette configuration, il faut se référer à l’article 990 I du Code général des impôts (CGI). Ce dernier prévoit ainsi un abattement de 152 500 € sur la somme transmise à chaque bénéficiaire, puis « un prélèvement de 20 % pour la fraction de la part taxable de chaque bénéficiaire inférieure ou égale à 700 000 €, et de 31,5 % si la somme dépasse cette limite ».
L’article précise également que « le nu-propriétaire et l’usufruitier sont considérés comme bénéficiaires au prorata de la part leur revenant dans les sommes versées par l’organisme d’assurance ».
Ces dernières sont déterminées selon un barème spécifique (article 669 du Code général des impôts (CGI)) :
Âge de l’usufruitier | Valeur de l’usufruit en % | Valeur de la nue-propriété en % |
- de 21 ans révolus | 90 | 10 |
- de 31 ans révolus | 80 | 20 |
- de 41 ans révolus | 70 | 30 |
- de 51 ans révolus | 60 | 40 |
- de 61 ans révolus | 50 | 50 |
- de 71 ans révolus | 40 | 60 |
- de 81 ans révolus | 30 | 70 |
- de 91 ans révolus | 20 | 80 |
+ de 91 ans révolus | 10 | 90 |
Le capital est ainsi distribué en fonction de l’âge de l’usufruitier. Si celui-ci a moins de 41 ans, il recevra 70 % du capital, et le ou les nu(s)-propriétaire(s) 30 %.
L’avantage de ce mécanisme réside dans le fait que le conjoint usufruitier est exonéré des droits de succession, il reçoit donc le capital sans impôt. Les droits de succession vont uniquement porter sur la quote-part des enfants nus-propriétaires.
Au moment du décès de l’usufruitier, les sommes qu’il a perçues sont récupérables par les nus-propriétaires, grâce à la créance de restitution.
Comme cette créance de restitution est à faire valoir sur la succession de l’usufruitier, ces sommes sont non taxées car c’est l’ensemble de la part de l’usufruitier qui est exclu des droits de succession.
Si la clause bénéficiaire n’avait pas été démembrée, le capital aurait été versé au conjoint, puis lors de son décès, aux enfants. Les sommes récupérées auraient été taxées au moment de la succession.
Prenons l’exemple de Monsieur CONCRET, âgé de 64 ans, qui a souscrit un contrat d’assurance-vie avec un versement initial unique de 600.000 €. La valeur du contrat est aujourd’hui de 800.000 €.
Au décès de Monsieur CONCRET, la clause bénéficiaire de son contrat mentionne son épouse quasi usufruitière et ses deux enfants nus-propriétaires.
Madame Concret est âgée de 63 ans. Selon le barème de l’article 669 du CGI, la valeur de son usufruit représente 40% de la valeur du contrat, soit la somme de 320.000 €.
Madame CONCRET, en sa qualité d’épouse, est totalement exonérée de toute taxation sur la somme perçue.
Les enfants de Monsieur CONCRET, en leur qualité de nu-propriétaire, bénéficient de 60 % de la valeur du contrat, soit la somme 480.000 €. Sur celle-ci, les enfants peuvent se prévaloir d’un abattement représentant 60 % de l’abattement prévu par l’article 990 I du CGI (152.500 €) soit 91.500 € chacun.
Ils seront donc taxés à hauteur de 20 % sur 148.500 € (480.000 €/2 – 91.500 €), soit une taxation de 29.700 € pour chacun des deux enfants
Au décès de Madame CONCRET, les sommes perçues au décès de Monsieur CONCRET sont transmises en franchise de taxe aux deux enfants.
3.2. Les primes versées après 70 ans
Dans cette hypothèse, c’est l’article 757 B du CGI qui s’applique. L’assurance-vie est, ici, moins intéressante fiscalement parlant car il n’y a qu’un seul abattement global de 30.500 €, partagés entre tous les bénéficiaires. Au-delà de ce seuil, les sommes sont soumises aux droits de succession suivant le degré de parenté existant entre les bénéficiaires et l’assuré.
Pour calculer la fiscalité applicable à l’usufruit et à la nue-propriété, il faut, là encore, se référer au barème de l’article 669 du CGI.
Ici, prenons l’exemple de Monsieur PRATIQUE dont le contrat d’assurance-vie a été souscrit à son 72e anniversaire avec un versement initial unique de 600.000 €.
Le contrat est d’une valeur de 700.000 € au jour de son décès et la clause bénéficiaire mentionne son épouse quasi usufruitière et ses deux enfants nus-propriétaires.
Cette transmission est taxée selon une base constituée uniquement des primes versées après le 70e anniversaire de Monsieur PRATIQUE, soit 600.000 €.
Les plus-values et intérêts de 100.000 € sont ainsi transmis sans droits.
Madame PRATIQUE, âgée de 72 ans, va percevoir, compte tenu de son âge, la somme de 180.000 € sur laquelle elle bénéficie d’une exonération totale de taxe.
Les deux enfants, bénéficiaires de 70 % du contrat, vont se voir appliquer des droits sur la base taxable suivante : 600.000€ x 70 % = 420.000 € moins un abattement global de 30.500 € soit 389.500 €.
La taxation sera effectuée pour chaque enfant en fonction de son lien de parenté et du barème applicable en cas de succession.
Selon le barème actuel, chaque enfant sera redevable de droits à hauteur de 37.144 €.

4. Les précautions en cas de démembrement d’une clause bénéficiaire
4.1 Bien rédiger la clause bénéficiaire
Pour que le démembrement soit efficace, il est très important que la clause bénéficiaire soit bien rédigée.
La clause bénéficiaire doit pouvoir prévoir toutes les éventualités, désigner des bénéficiaires en cascade pour parer un éventuel prédécès. Il est aussi essentiel qu’elle contienne la mention « à défaut mes héritiers » afin d’être sûr que le contrat sera bien transmis, à, au moins, un bénéficiaire.
Une clause qui ne serait pas suffisamment explicite empêcherait, par exemple, l’assureur de savoir précisément qui est l’usufruitier et le ou les nu(s)-(propriétaire(s).
4.2 L’obligation de remploi
L’autre principal risque du démembrement de la clause bénéficiaire est le cas où l’usufruitier dépense tout le capital reçu :
- Les nus-propriétés ne pourraient alors rien récupérer au décès de l’usufruitier malgré leur créance de restitution.
- De plus, n’étant pas considérés comme des créanciers privilégiés, ils ne seraient pas prioritaires sur la succession.
Comme nous l’avons précisé, lorsqu’au décès du souscripteur, l’usufruitier perçoit son usufruit, il est libre d’en disposer comme il l’entend.
Sa seule obligation, c’est qu’à son décès, les nus-propriétaires puissent récupérer une somme au moins équivalente.
Pour éviter tout risque de dilapidation, le souscripteur peut ainsi prévoir une obligation de remploi. Cela impose à l’usufruitier d’utiliser la somme perçue d’une manière précise (achat d’un bien immobilier, achat de parts de SCPI, etc.).
Cette obligation de remploi peut figurer dans le contrat d’assurance-vie ou par acte séparé.
Mais pour être certain que les fonds soient utilisés selon les volontés du souscripteur, il est préférable de passer par un acte authentique devant un notaire, qui pourra ainsi vérifier que les souhaits du souscripteur sont respectés.

Vous l’aurez compris, le démembrement de la clause bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie est un outil efficace de transmission de patrimoine, à condition que la clause soit bien rédigée. Pour cela, faites vous aider par des experts ! Chez cheval Blanc Patrimoine, nous pourrons vous accompagner dans la souscription de votre contrat d’assurance-vie et dans la rédaction de sa clause bénéficiaire. Sébastien est diplômé notaire et apporte une valeur ajoutée importante aux stratégies présentées à nos clients. Posez lui vos questions !